Saturday, April 27, 2024





20h00 ▪
8
min de lecture ▪ par
Luc Jose A.

En matière de cryptos, la procédure du KYC (Know Your Customer) est vendue comme une nécessité. Un moyen de prévenir le blanchiment de capitaux et autres activités illicites qui pullulent dans ce secteur. Bien que légitime dans son esprit, cette méthode de vérification minutieuse de l’identité des utilisateurs n’est pas moins sujette à des critiques. Et elles sont virulentes, certains analystes estimant que le KYC peut avoir des conséquences néfastes pour la crypto. Notamment parce que cette procédure de vérification remet en cause la pérennité de cette technologie. Ceci, en sapant les principes fondamentaux de cette dernière. Dans cet article, nous explorons les implications controversées du KYC et son impact sur l’écosystème crypto.

Des pièce de cryptos phares et la mention "KYC"

Quand le KYC met en danger la confidentialité de la crypto

Il faut dire que la vision de Satoshi Nakamoto pour la crypto à travers la blockchain Bitcoin était claire. C’était de promouvoir une confidentialité financière qui soit en dehors de tout contrôle centralisé. Cependant, la procédure du KYC apparue dans la foulée des nombreuses évolutions qu’a connues l’industrie crypto, a émergé comme un changement de paradigme réglementaire. Une sorte de cheval de Troie qui a remis en question l’essence même de la confidentialité crypto.

En effet, le KYC s’est infiltré dans le domaine des cryptos lorsque les gouvernements ont exigé son adoption par les plateformes boursières afin de faciliter les transactions d’actifs numériques. Une exigence intervenue dans un contexte de problèmes de sécurité et d’abus. Alors qu’à l’origine, cette procédure n’avait pour vocation première que d’aider les banques à tenir à jour les dossiers d’identification de leurs clients et leurs profils de risque.

Pourtant, la tendance d’universalisation de l’imposition de la procédure du KYC  est aux antipodes de la nature intrinsèque de ces transactions crypto. C’est pour le moins l’avis d’Andreas Antonopoulos, auteur et entrepreneur de renom. Selon lui, il s’agit d’une incompréhension fondamentale de la technologie. Dans son ouvrage The Internet of Money, il affirme que « le suivi, la surveillance et le contrôle de chaque transaction compromettent la vie privée et méconnaissent l’essence des cryptos ». Le lanceur d’alerte Edward Snowden formule des critiques similaires en allant un peu loin toutefois. Pour lui, la procédure de vérification KYC est essentiellement un compromis périlleux. Il prévient : « Si le KYC peut feindre la sécurité, il pèse sur la vie privée des individus — un compromis dangereux à l’ère numérique ».

Il est étonnant au vu de ces avertissements que des membres éminents de l’industrie crypto promeuvent cette technologie. C’est le cas notamment de Brad Garlinghouse, PDG de Ripple. Il plaide pour des mesures robustes de KYC et de lutte contre le blanchiment d’argent soulignant leur rôle dans la lutte contre la fraude crypto. Idem pour Jeremy Allaire, le PDG de Circle. Lui, il estime que le KYC serait essentiel pour établir la confiance et attirer les investisseurs institutionnels et les régulateurs dans le giron de la crypto. Leur prise de position respective sur le sujet n’enterre pas pour autant la réalité des faits qui est que le KYC affecte la vie privée. Voyons comment.

L’influence négative du KYC sur la vie privée des utilisateurs

N’en déplaise à ceux qui se font les apôtres du KYC, ce procédé de vérification met à mal la vie privée des utilisateurs que la blockchain est censée protéger. Ceci, à travers un conflit entre les mesures KYC et les principes fondamentaux de la crypto. Cette dichotomie est visible à plusieurs niveaux.

D’abord, les cryptos, dont le bitcoin (BTC) est l’exemple le plus représentatif, fonctionnent sur la base de l’anonymat. Un procédé qui permet aux utilisateurs d’opérer dans le secteur sans révéler leurs informations personnelles. Or, le KYC, dont les « mérites » sont tant vantés, flingue ledit anonymat en plein cœur en facilitant la traçabilité, rendant vulnérable la vie privée des utilisateurs. Résultat, avec le KYC, qui a introduit la centralisation des données au sein des exchanges, le risque de violation de données et d’usurpation d’identité n’a jamais été aussi important.

Sans compter, en second lieu, que le caractère obligatoire des procédures de KYC a un effet dissuasif sur les utilisateurs. Ceux-ci sont en effet découragés de participer à l’industrie crypto. En particulier dans les régions où les cadres réglementaires sont stricts ou où les préoccupations en matière de protection de la vie privée sont plus rigoureuses.

Dans ce contexte, il semble que le KYC, avec l’adoption croissante des protocoles de lutte contre le blanchiment d’argent (AML), est devenu un sacré défi pour l’industrie crypto. Pourtant, paradoxalement, des données révèlent que ce sont des sommes faramineuses qu’on injecte dans cette technologie. Rien que pour l’année 2020 par exemple, l’investissement mondial lié aux procédures KYC a culminé à 1,2 milliard de dollars. Des dépenses collectives qui ont éclipsé les coûts combinés engagés par toutes les offres frauduleuses d’ICO.

Au-delà des répercussions individuelles, la mise en œuvre du KYC amplifie également la surveillance réglementaire. Ceci, en accablant les firmes crypto d’obligations de conformité qui peuvent étouffer l’innovation, décourager l’investissement et entraver les progrès technologiques.

Tout n’est pas à jeter à propos du KYC

Présentée comme nous l’avons fait jusqu’ici, on pourrait en déduire que la procédure du KYC n’a rien de bon et qu’il faut s’en débarrasser. Conclure cela serait une grave erreur d’appréciation, car malgré tout, le KYC demeure une composante essentielle de l’industrie crypto. Ceci, à plusieurs égards.

D’abord, l’identification des clients joue un rôle essentiel dans la protection des utilisateurs. De fait, la mise en œuvre de mesures KYC offre à ces derniers un niveau de sécurité accru en agissant comme un bouclier contre accès et transactions non autorisés. Cela permet de réduire le risque de fraude crypto en inspirant davantage confiance aux utilisateurs.

Ensuite, le KYC contribue à l’acceptation institutionnelle des cryptos. Des procédures de KYC solides permettent aux firmes financières traditionnelles d’adopter et d’intégrer plus facilement les cryptos à leurs activités. Or, cette acceptation s’avère cruciale pour l’adoption grand public et l’investissement dans le marché crypto. Une perspective qui est jugée déterminante pour combler le gap avec le secteur financier classique.

Finalement, la procédure du KYC reste une exigence importante parce qu’il s’aligne sur les normes réglementaires. Notamment parce qu’il renforce la protection des utilisateurs et favorise l’acceptation des cryptos par les institutions financières traditionnelles. Son rôle dans le maintien de l’intégrité, de la sécurité et de la confiance souligne son importance constante dans le paysage évolutif des cryptos.

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Luc Jose A.

Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d’une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j’ai rejoint l’aventure Cointribune en 2019.
Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l’économie, j’ai pris l’engagement de sensibiliser et d’informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu’elle offre. Je m’efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l’actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.

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Les propos et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leur auteur, et ne doivent pas être considérés comme des conseils en investissement. Effectuez vos propres recherches avant toute décision d’investissement.





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