L’Arabie saoudite s’inquiète

Le système monétaire international est au cœur des tensions géopolitiques et beaucoup va dépendre du sort des réserves de change russes.

Le Financial Times révèle ce lundi que le ministre des Finances saoudien s’est alarmé à l’occasion de la dernière réunion du G20. Les pays du G7 veulent-ils vraiment piller ces réserves pour financer la guerre en Ukraine ? Réalisent-ils vraiment les conséquences d’une action aussi radicale ?

L’Arabie saoudite et les pays membres de l’OPEP détiennent une partie substantielle de la dette occidentale. Saisir pour de bon les réserves russes pourrait remettre en cause le système monétaire international.

Ryad a d’ailleurs déjà pris les devants en réduisant de manière drastique ses réserves de dollars. « Les saoudiens sont très inquiets », a déclaré un fonctionnaire européen.

En sachant que la saisie des réserves de change russes ruinerait essentiellement la signature de l’Europe. En effet, le FT rapporte que seulement 5 milliards de dollars ont été gelés par les États-Unis. Plus de 190 milliards sont en réalité des euros. Le reste étant constitué de Francs suisse, de yens, etc.

Voilà pourquoi les conseillers de la Maison-Blanche déclarent des choses comme : « nous avons immobilisé les actifs ensemble ; nous aimerions également les mobiliser ensemble »…

Les banquiers centraux du G7 sont toutefois vent debout, conscients du rôle crucial que jouent les réserves de change dans le système monétaire international. Christine Lagarde a prévenu que « passer du gel des actifs à leur confiscation, puis à leur cession [pourrait comporter le risque de] rompre l’ordre international que l’on veut protéger ».

Washington prêt à sacrifier l’Euro

Les États-Unis ont voté fin mai un budget de 61 milliards de dollars pour armer l’Ukraine. La loi de financement accorde aussi à la Maison-Blanche le droit de saisir les actifs russes détenus par les États-Unis.

Mais encore une fois, une telle mesure serait indolore pour les États-Unis qui peuvent saisir que 5 milliards de dollars. « Ils n’ont pas grand-chose à perdre », déclare un diplomate européen au FT.

Néanmoins, peut-être que les États-Unis ont dans l’idée de saisir les 770 milliards de dollars de réserves chinoises… Le secrétaire au Trésor Anthony Blinken a d’ailleurs récemment menacé de déconnecter certaines banques chinoises du dollar.

Quoi qu’il en soit, la saisie pure et simple des réserves russes ne semble plus sur la table. Le gouvernement de Joe Biden propose à présent de débloquer un prêt de 50 milliards de dollars pour l’Ukraine qui serait garanti via les intérêts générés par les actifs gelés (2.5 milliards € par an).

Ce plan pose toutefois un problème si la guerre se termine dans un avenir proche. « Il se peut que la Russie accepte de faire des concessions territoriales à l’Ukraine en échange de ses fonds gelés. Vous ne pouvez pas faire cela si vous avez déjà hypothéqué ces actifs », a déclaré un fonctionnaire allemand.

L’UE est plutôt d’avis d’utiliser directement les intérêts générés par les actifs russes pour acheter conjointement des armes pour l’Ukraine. Ce serait beaucoup moins risqué que l’accaparement direct des réserves russes.

Le vieux continent se méfie de tout ce qui pourrait affecter négativement le statut de monnaie de réserve internationale de l’euro. La monnaie unique représente 22 % des transactions internationales et 20 % des réserves de change.

Riposte au travers des BRICS

N’oublions pas non plus que la Russie peut répondre saisissant des actifs européens se trouvant en Russie. Les sociétés étrangères y détiennent des actifs d’une valeur de 285 milliards de dollars, selon une étude de Armin Steinbach, professeur à HEC.

La plus grande partie (~105 milliards $) appartient à des entreprises européennes. Cela représente plus de trois fois les 36 milliards de dollars d’actifs détenus par les entreprises américaines.

Plus globalement, les représailles russes se feront surtout sentir au travers des BRICS et des trente nations qui désirent rejoindre le club. La Russie préside le groupe en 2024 et compte bien accélérer le processus dédollarisation.

Cependant, commercer en monnaies nationales à ses limites. Par exemple, l’Inde n’a pas grand-chose à vendre à la Russie en échange de son pétrole. Moscou a donc cessé d’accepter la roupie en paiement.

La question du remplaçant du dollar et de l’euro reste en suspend. L’or a évidemment le vent en poupe, mais il n’est pas un système de paiement. Le métal ne voyage pas par la fibre.

Si Vladimir Poutine veut véritablement retirer aux États-Unis leur privilège exorbitant, c’est avec une monnaie à la pointe de la technologie qu’il faudra faire.

Un monde où toutes les nations sans exception commercent à armes égales requiert une monnaie ainsi qu’un système de paiement neutres. Le Bitcoin est taillé pour ce rôle puisqu’il est une monnaie apatride en même temps qu’un réseau de paiement non censurable auquel chacun est libre de participer.

La protection du pétrodollar est largement responsable des tensions géopolitiques actuelles. Il est temps de forger un nouveau système monétaire international et le bitcoin peut en devenir une pièce maitresse.

Nicolas T.

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