300 milliards $ « gelés »

Les gouvernements des États-Unis, d’Australie, du Canada, du Japon, du Royaume-Uni, de la Commission européenne et de la zone euro ont saisi environ 300 milliards de dollars appartenant à banque centrale russe immédiatement après l’invasion de l’Ukraine.

Cette somme colossale représentait près la moitié des réserves de change russe au moment du gel. La majeure partie de cet argent – environ 200 milliards d’euros – est gelée par la banque centrale européenne et Euroclear.

Soit dit en passant, il s’agit de 200 milliards sous forme d’obligations d’États de la zone euro. Il s’agit donc d’argent que les gouvernements du G7 doivent à la Russie.

À ces 300 milliards de dollars s’ajoutent des dizaines de milliards de dollars d’actifs (avions, yachts, bateaux, etc) appartenant à des entités privées russes. Les États-Unis ont déjà transféré à l’Ukraine quelques millions de dollars d’actifs confisqués à un milliardaire russe.

Aujourd’hui, la question se pose quant au transfert des réserves de la banque centrale russe à l’Ukraine.

La secrétaire au Trésor Janet Yellen a déclaré que des « obstacles juridiques importants » s’opposaient à la confiscation des avoirs du gouvernement russe. Néanmoins, un groupe bipartisan de législateurs américains a présenté un projet de loi visant à donner à Joe Biden l’autorité légale pour le faire.

Les dirigeants de l’Union européenne y pensent aussi. « La question de la confiscation des avoirs russes est complexe », a déclaré Christine Lagarde.

« Le financement de la reconstruction de l’Ukraine devra respecter l’environnement juridique international dans lequel nous évoluons. Il faudra être particulièrement attentif à l’ordre monétaire international et l’État de droit qui prévalent depuis des décennies », a-t-elle ajouté.

La présidente de la BCE semble plutôt d’avis de reverser à l’Ukraine les intérêts générés par les actifs russes saisis, plutôt que de tout confisquer. Soit plus de 3 milliards de dollars par an.

Le G7 va-t-il piller la Russie ?

Les pays du G7 sont divisés quant à la question des avoirs russes. L’effet boomerang pourrait d’avérer douloureux.

« Le Royaume-Uni est prêt à accorder à l’Ukraine un prêt correspondant au montant des avoirs gelés de la Russie, au motif que la Fédération de Russie sera contrainte de payer des réparations après la fin du conflit », a déclaré le ministre britannique des Affaires étrangères David Cameron.

Washington soutient la confiscation totale. « En ce qui concerne les avoirs russes, nous examinons les options liées à la saisie de ces fonds », a déclaré Janet Yellen, secrétaire d’État au Trésor américain.

« Ce n’est que l’une des stratégies possibles. Nous étudions un certain nombre de stratégies différentes qui nous permettraient d’utiliser ces actifs en faveur de l’Ukraine », a-t-elle ajouté.

Néanmoins, la France, l’Allemagne et l’Italie s’y opposent. Emmanuel Macron s’oppose à une saisie « contraire au droit international » et qui « affaiblirait l’Europe ».

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen est également d’avis de ponctionner les intérêts générés par les avoirs russes « pour acheter conjointement des équipements militaires pour l’Ukraine ».

Même son de cloche du côté de la Suisse où le Conseil cantonal a approuvé l’idée d’utiliser les avoirs gelés russes en faveur de l’Ukraine. Nous parlons de plus de 8 milliards de dollars.

Le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov a prévenu que la Russie répondra à toute confiscation définitive des avoirs russes :

« Si les actifs russes sont saisis, nous pouvons retenir les fonds des pays occidentaux que nous avons gelés en réponse à la saisie des réserves de change russes. Il ne fait aucun doute que nous réagirons de manière appropriée. »

Du pain béni pour le bitcoin

Les partisans de la confiscation des avoirs russes affirment que le président américain peut saisir les avoirs russes. Après tout, les présidents Ronald Reagan, George Bush et Joe Biden ont respectivement pillé les avoirs iraniens, irakiens et afghans…

Mais Moscou, ce n’est pas Kaboul. La Banque centrale européenne a averti en privé les dirigeants de l’Union que saisir les avoirs russes pourraient entacher la réputation internationale de l’euro en tant que deuxième monnaie de réserve internationale, augmenter les couts d’emprunt des gouvernements européens et nuire aux relations commerciales de l’UE.

Des inquiétudes similaires se manifestent aux États-Unis concernant le dollar qui représente 58 % des réserves de change globales. Certains experts financiers estiment qu’il n’y a pas lieu de s’alarmer. Ils avancent qu’il existe peu d’alternatives au dollar, à l’euro et les autres monnaies de réserve du G7.

En effet, la Chine semble préférer maintenir un contrôle des changes plutôt que d’attirer l’épargne étrangère. Le risque étant que le yuan s’apprécie et mette à mal son industrie, ce qui pourrait provoquer des troubles sociaux dans ce pays de 1.3 milliard de personnes.

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Nicolas T.

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